De belles histoires sur le Français du professeur Yoshimi ASAHINA




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Réflexions autour du Petit Prince 1
Le Petit Prince ou le prince des étoiles?
10.2005Liste des essaisPrécédentSuivant

Plusieurs nouvelles traductions
C’est bien d’avoir décidé de parler du Petit Prince, de Saint-Exupéry la dernière fois, mais j’ai eu un problème dès la traduction du titre. L’auteur a écrit ce livre aux Etats-Unis, et comme la France était occupée par les Allemands , la traduction anglaise est sortie avant la version originale. Mais pour cette traduction aussi bien que pour la nouvelle, le titre est « The Little Prince », et entre le français et l’anglais, il n’y a aucun problème, mais ce n’est pas le cas pour la version japonaise. La premiere à sortir était bien sûr celle de Arô Naitô, et contrairement à Shizuko Wakamatsu qui avait traduit par « Shôkôshi » l’ouvrage « Little Lord Fauntleroy » de Frances Hodgson Burnett (en français, il suffit de remplacer “little” par “petit”), il à proposé, après mure réflexion, le titre « Hoshi no ôjisama ».
C’est là que se situe l’origine du problème. Non seulement le texte principal, mais le titre aussi étaient très bien traduits, et personne ne se souciait plus de la distance au titre original, du fait que ce dernier a été apprécié durant un demi siècle depuis la dernière guerre. Mais, comme une voie vers une nouvelle traduction ces derniers temps, de nombreuses traductions sont apparues dans les librairies, ce qui a entraîné la nécessité de repartir à partir du titre original.

 La traduction de Yumiko KURAHASHI (Takarajima sha, désigné par A dans ce qui suit) a suivi la traduction de Naitô, en y rajoutant le terme « Nouvelle traduction ». Celle de Natsuki IKEZAWA (Shueisha bunko, idem B) a imité cet exemple, mais, en plus d’insérer, l’air de rien « Nouvelle traduction » après le nom du traducteur, a ajouté une note sur le titre à la fin de l’ouvrage ; il l’a justifié en disant "Ce titre en japonais est excellent. En vérité, on ne peut en imaginer qui le surpasse."
A l’opposé, la traduction de Yôichirô YAMAZAKI (Misuzu shobô, idem C) a délibérément opté pour une traduction directe, et expliqua la raison de la manière suivante : "La traduction traditionnelle du titre en japonais, qui peut être interprétée comme l’histoire d’un prince habitant une étoile, ne met en avant que la partie romanesque de l’œuvre, J’ai donc pensé qu’il y avait un risque de faire passer à coté de son aspect intérieur." Ici, la signification de l’expression « aspect intérieur » est expliquée par "Un dialogue intérieur entre un adulte et un petit enfant, qui se déroule dans la tête du pilote."
Ce point de vue rejoint les intensions de A. Bien qu’elle ait fait une concession sur le titre, il semble qu’elle ressentait depuis longtemps de l’antipathie à l’égard de l’acceptation, à la manière de la maison d’édition Iwanami : "Il s’agit d’un livre, qui se trouve au rayon enfant des librairies, et a la propriété de s’approprier l’écrasante popularité des enfants." En s’y opposant totalement, elle affirme : "Ce n’est pas un ouvrage écrit par un enfant, qui ne leur est pas destiné ; c’est un roman pour adultes écrit par un homme de quarante ans passés." Et, en suivant la théorie admise sur les romans européens, elle estime que c’est en fait un dialogue entre le « moi » adulte, et le « soi, non adulte ».
Mais pourquoi a-t-on mis « de l’étoile » ? B, qui a suivi la traduction de Naitô dit avec "Chîsana ôjisama", la familiarité contenue dans le "petit" d’origine ne passe pas tel quel. "Comme il s’agit d’un titre, il serait heureux d’avoir un terme pour le caractériser", explique- t’il et poursuit : l’expression « de l’étoile » suit l’ancienne tradition japonaise de "mettre le nom du lieu de résidence d’un personnage devant le sien", comme « Jirochô de Shimizu » ou « La Dame de Kiritsubo », et c’est pour cela même qu’il dure depuis si longtemps.


Saint-Exupéry dans son poste de pilotage
Ce sont des remarques pertinentes, qui ont permis de découvrir un aspect des secrets du succès de l’œuvre au Japon. Mais C, qui est la référence en ce qui concerne la recherche sur Saint-Exupéry, réfute l’ajout « des étoiles » en mettant en oeuvre toutes sortes d’interrogations. En résumé, ni la chute, ni la disparition du Prince de la Terre ne sont naturelles, et tenant compte du fait que plus on se rapproche de la fin, plus le mystère s’épaissit, il conclut : "L’apparition du Prince n’est-elle pas le résultat de la fantaisie de l’auteur dans le désert où tout est possible ?". En admettant ceci, le fait de « Fixer le Prince dans un endroit extérieur » en ajoutant « des étoiles » risque d’être contraire à l’intention de l’auteur, à tout le moins, à le déformer, et dit qu’il faut éviter cela.
Il me semble que mon texte est devenu le plus difficile jusqu'à présent Je termine ici en donnant les titres en japonais des ouvrages précédemment traduits, ce qui fait le lien avec le fait que B dit que si l’on traduit par « chîsana » le terme «petit », on ne rend pas "l’impression de familiarité". Le terme « petit », qui est entré dans la langue japonaise, est beaucoup usé (et même abusé) sous la forme de « petit-tomate » ou « petit-hôtel ». Dans les deux cas s’est justement par le fait qu’on a senti quelque part que la traduction par « chîsana » n’est pas idéale qu’il s’est fixé. Pour résumer, en traduisant, il ne faut pas négliger ce terme, en pensant qu’il est "petit".

Le Petit Poucet, Hop o'my Thumb, « Oyayubi Kozô »
Le Petit Chaperon rouge, Little Red Riding Hood, « Akazukinchan »,
La Petite Sirène, Little Mermaid, « Ningyohime »
  La prochaine fois, je parlerai enfin du Petit Prince lui-même

 
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