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"Mon énergie à Paris : les relations
humaines."
Moi et l’autre, entre individualités.
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09.2004 |
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Je pense que peu de personnes ignorent le chef-d'œuvre de la littérature
française du XXe siècle, « À la recherche du temps perdu », de Proust,
mais je pense que le nombre de personnes l’ayant lu en entier doit
également être faible. Bien qu’il soit connu pour être très long
et difficile à comprendre, il y a paradoxalement de nombreux chercheurs
qui travaillent sur cet auteur parmi les Japonais. Quel est en fait
son charme…. ?
Nous avons interrogés Mlle Mai YOSHINO, qui, tout en étant jeune,
s’est fait fasciner par Proust, sur sa vie de recherches à Paris,
et séjourne en France depuis six ans.
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■ Interview |
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"Pour commencer,
racontez-nous comment vous avez connu Proust, et pourquoi vous vous
êtes mise à l’étudier."
C’et au collège que je l’ai découvert. Comme j’étais dans une école
de filles qui menait directement à l’université, je n’avais pas
spécialement trouvé un passe-temps, je lisais les uns après les
autres les livres de la bibliothèque, en choisissant ceux qui me
semblaient les plus longs à lire, et je suis finalement tombée sur
« La recherche du temps perdu », de Proust. Bien sûr, je n’y comprenais
pratiquement rien, mais il y avait quelque chose, qui faisait vibrer
une corde sensible en moi. La difficulté de compréhension vient
peut-être de la traduction (rire), et j’ai eu envie de le lire en
version originale, mais comme je me suis aperçue qu’il n’y avait
pas de section de français, si je continuais dans cette voie, j’ai
passé le concours d’entrée aux universités.
Je n’avais pas d’idée bien précise, et j’ai juste poursuivi Proust
à l’instinct, mais ceci a provoqué de nombreuses autres rencontres
; avec des tableaux, des musiques, ou des autres auteurs. Mais,
le plus important, cela est peut-être terre-à-terre, est celle que
j’ai faite avec moi-même. Lorsque je relis Proust, je me rends compte
qu’il rend en paroles toutes les choses que je découvre en dehors
de la recherche, avec des moyens dynamiques qui lui sont propres.
En lisant son œuvre, je ne peux m’empêcher de chercher un moyen
de rendre ces mots par les miens, c'est-à-dire d’avoir un véritable
dialogue avec moi-même, ce qui est un luxe, n’est ce pas ?
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Devant la bibliothèque François Mitterrand. |
"Dites-nous plus sur
votre vie à Paris."
Comme, pour le cinéma et les théâtres, l’environnement est bien
meilleur qu’à Tokyo des points de vues du choix et des prix, j’en
ai bien profité.
Depuis que j’étais au Japon, j’aime me mettre dans toutes sortes
d’environnements, sans me limiter à l’université, à travers, par
exemple des travaux de traduction. Mon premier objectif était de
vaincre ma timidité, mais j’ai commencé à comprendre juste un petit
peu, ce que j’ai fait dans la société et quels rapports j’ai eu
avec elle, à travers la rencontre de différentes personnes appartenant
à plusieurs mondes. Et plus tard, j’ai compris pourquoi je voulais
autant travailler.
J’ai eu de la chance d’avoir eu des rapports avec le nô ou le kyôgen,
à l’étranger, en plus sous la forme plus interne : la traduction.
Je pense que beaucoup
ont été étonnés par la beauté de l’extérieur, des halls ou des
grandes salles des opéras de Paris. Des visites sont organisées,
et tout au fond du rez-de-chaussée du Musée d’Orsay, il y a
une exposition sur la structure de l’Opéra, et on peut y voir
une maquette de l’Opéra Garnier ; je pense que vous serez encore
plus étonné par les nombreux dispositifs pour montrer ce qui
est beau.
Opéra de Paris : http://www.opera-de-paris.fr/
Musée d’Orsay : http://www.musee-orsay.fr
A la Maison de la culture du Japon à Paris, située près de la
Tour Eiffel, des spectacles d’arts traditionnels de ce pays
sont régulièrement organisés. Des représentations, qui sont
chères et assez ésotériques dans notre pays, sont organisées
de manière à être facile d’accès, et à des prix raisonnables.
Vous serez aussi certainement étonnés par la profondeur de la
connaissance de culture traditionnelle japonaise par les Parisiens
amateurs.
Maison de la culture du Japon à Paris : http://www.jpf.go.jp/mcjp/index.html
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Mlle YOSHINO nous présente la bibliothèque. |
"L’environnement parisien
doit être indispensable pour étudier Proust, qui a décrit la culture
et la mode des années 1900. D’autre part, que faisiez-vous concrètement
pour vos recherches ?"
Les deux ou trois premières années, j’ai fréquenté les cours de
la faculté pour avoir mes unités de valeurs. A présent, je ne fais
quasiment plus que des recherches à la bibliothèque, et je rédige
mon mémoire à la maison.
Mes travaux portent sur la situation culturelle à Paris (les modes
du ballet russe, de la danse de salon, ou des accessoires de modes
sont mes trois sujets principaux.) pendant quelques années, aux
alentours de 1913, que je trouve sur les articles de journaux, des
magasines de théâtres ou de mode féminine de l’époque. J’ai l’impression
de vivre avec eux en accéléré, ce qui est pour moi un plaisir irremplaçable.
Pour pouvoir avoir accès au rez-de-chaussée de la bibliothèque François
Mitterrand, réservé aux chercheurs il faut obtenir une carte de
chercheur après un entretient pour montrer quel est l’objet de nos
travaux, et dans quels buts.
Bibliothèque national de France : http://www.bnf.fr/ |
Voici la carte de chercheur. |
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